Voir la source de Amresume 20070824
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<h4>> [[ars_magica|Ars Magica]] > [[amannales_andalouses|Annales Andalouses]] > [[amresumes|Résumés]] > Séance du 24 août 2007 : Automne 1165</h4>\\ ---- \\ < { [[amresume_20070615|Fin été 1165]]}\\ {(Remarque : la séance en juillet étant fort courte, les données ont été reprises dans ce compte-rendu-ci)<br>\\ SYNTHESE : Le Sultan Abi Nassif est arrivé à Aquae Arcanum. Il nie avoir ordonné le meurtre de son cousin Hiram. Les mages annulent l'opération mais cachent le fait qu'ils savent la vérité. Ils espèrent découvrir les commanditaires durant la chasse tout en veillant à la sécurité du Sultan et de son cousin. Le premier jour de la chasse est consacré aux cerfs. Les mages découvrent que Nitran, marchand d'armes Cordouan, veut à tout prix convaincre les Almohades d'acheter ses nouvelles arbalètes. Quitte à tuer le grand cerf réservé pourtant au Sultan !} <br>\\ <br>\\ {Dans le même temps, les Almohades se révèlent divisés : les militaires pestent contre l'emprise croissante des marchands et ces derniers rivalisent entre eux. Ainsi, Bouktir (qui, selon Wigéric, semble être très proche de la sainteté véritable) essaie de convaincre les nouveaux maîtres du col de baisser leurs taxes sur le commerce entre Motril et Jaen. De cette façon, Bouktir pourrait se passer de Suleiman qui tente de diriger cette ligne commerciale. Abdel Kader négocie âprement l'affaire avec Bouktir. Après la journée de chasse, Korman obtient un accord avec Nitran : s'il arrive à convaincre les militaires d'acheter des arbalètes, il recevra de Nitran des armes et de l'or. Korman persuade difficilement les mages d'accepter cet accord, malgré que cela pourrait aider les Almohades contre les chrétiens.}<br>\\ <br>\\ {Au 2e jour, durant le trajet vers la forêt aux sangliers, Antoine et Ainhoa poussent Suleiman à s'éloigner du groupe pour se soulager d'un besoin pressant et le font se perdre. Obligés d'attendre qu'Aïello retrouve le haut dignitaire, les autres chasseurs se laissent enthousiasmer par une démonstration de tir à l'arbalète "improvisée" par Nitran et Korman. Les militaires se montrent réticents. Le Sultan aussi. Abdel Kader apprend que Nitran achète les arbalètes aux chrétiens pour les revendre aux Almohades. Cet acte pourrait être impie et le marchand est encore incapable d'assurer sa propre production. Mais Suleiman revient, un peu KO, et la chasse aux sangliers peut commencer. Les démons vont-ils encore frapper ?}\\ <h1>Partie de chasse</h1>\\ <br>\\ <br>\\ <h2>1. Présentations</h2>\\ Le souvenir des automnes dans la Sierra me procure, encore aujourd'hui, une joie ineffable, et un parfum de mélancolie. L'air y est plus doux qu'ailleurs, la brise se lève et vient caresser les joues, les arbres et le ciel doucement s'habillent de feu. La nature tout entière semble s'apaiser après les éclats de l'été, et avant le repos de l'hiver. Et dans les hauteurs, là où [[amcovenant_aquae_arcanum|Aquae Arcanum]] a développé son nid, l'atmosphère semble hésiter encore, jouant à picoter nos visages le matin avant de les étreindre quelques heures plus tard. Cette tendresse, je l'ai espérée contagieuse. Elle avait tiédi le coeur de ses habitants, gagné à sa cause les anciens maîtres venus des déserts et je rêvais qu'une fois encore elle rallierait les nouveaux seigneurs de l'Andalousie, les berbères [[amgroupe_almohades|Almohades]]. Et ce soir-là de l'automne 1165, en contemplant nos invités, je réitérai mon voeu. <br>\\ <br>\\ Ils mangeaient dans la grande tente réservée à cet effet, dans le camp de base que nous avions établi, sur base des précieuses indications de [[ampnjshirine|Shirine]], loin du covenant, à 1600 ou 1700 mètres d'altitude, dans une prairie large et accueillante. La nuit chassait lentement le jour et les feux brûlaient déjà pour réchauffer les hommes fatigués. Ils avaient marché toute la journée, portant les affaires de leurs seigneurs, grimpant sur des sentiers parfois escarpés, toujours tortueux, s'éloignant un peu plus à chaque pas des palais de Grenade pour s'enfoncer dans la nature sauvage. Du moins était-ce là le souhait des seigneurs, la façade présentée car, aussi stricts soient-ils, ces nouveaux maîtres aimaient un peu de confort et appréciaient ce nouveau village de tentes où tout ou presque était à leur disposition.<br>\\ - En tête de la tablée, assis sur des coussins doux, le Sultan [[ampnjabi_nassif|Abi Nassif]] dégustait le plat du soir, toujours vêtus de sa tunique de voyage, sobre mais relevée par des ustensiles d'apparat. Son regard sombre glissait sur la table, voilé, impénétrable. De temps en temps, il devisait avec un de ses voisins sans laisser paraître quelque ennui que ce soit. De manière presque automatique, il présidait.\\ - A sa droite, son oncle [[ampnjsuleiman_ibn_hassef|Suleiman Ibn Hassef]], la chevelure et la barbe abondantes et blanches comme le sel. Un regard aigu et supérieur posé sur les autres convives. L'homme le plus important après le Sultan, voire peut-être avant celui-ci.\\ - [[ampnjmarik_ibn_suleiman|Marik Ibn Suleiman]], fils du précédent et cousin du Sultan, s'était établi à [[amville_motril|Motril]]. Il semblait se comporter à l'image de son père.\\ - [[ampnjhiram_ibn_harkir|Hiram Ibn Harkir]], autre cousin du Sultan, celui qui était désigné comme cible et qui commandait une troupe à [[amville_grenade|Grenade]].\\ - [[ampnjrassan|Rassan Ibn Salef Al Gossara]], le nouveau gouverneur de [[amville_motril|Motril]] était assis en face, aux côtés de :\\ - [[ampnjmagued|Magued]], un des jeunes fils du Sultan, âgé de 18-19 ans et visiblement très discret.\\ - Le septième officiel était un homme étrange, très observateur, [[ampnjbouktir_al_rachid|Bouktir Al Rachid]], conseiller du Gouverneur de AMVilleJaen, le dénommé [[ampnjolar_al_moktar|Olar Al Moktar]].<br>\\ </br>\\ <br>\\ Aux côtés de ces 7 officiels, il y avait deux marchands :\\ - [[ampnjnitran_ibn_malik|Nitran Ibn Malik]], un quadragénaire de [[amville_cordoue|Cordoue]]\\ - et [[ampnjtain_ibn_hassan|Taïn Ibn Hassan]], installé à [[amville_motril|Motril]] et peut-être opposé au projet de Suleiman qui voulait que [[ampnjmarik_ibn_suleiman|Marik]] ouvre un comptoir dans la ville portuaire.\\ <br>\\ </br>\\ <br>\\ Deux militaires étaient également présents :\\ - [[ampnjbarbas|Barbas]], jeune (dans la trentaine) chef de la garnison de [[amville_motril|Motril]], visiblement proche\\ - d' [[ampnjidil_ibn_oumar|Idil Ibn Oumar]], vieux général du Sultan, basé à [[amville_grenade|Grenade]].\\ <br>\\ </br>\\ <br>\\ Enfin, deux conseillers complétaient le tableau :\\ - [[ampnjmime|Mime Ibn Tadir]], un homme assez âgé,\\ - et [[ampnjdafr|Dafr Al Harkar]], plus jeune. Tous deux travaillaient au service du Sultan et étaient deux Almoravides "convertis" au nouveau régime. Nous apprîmes un peu plus tard dans la soirée qu'ils jalousaient [[ampnjhiram_ibn_harkir|Hiram]] en raison de sa relation privilégiée avec le Sultan.\\ <br>\\ </br>\\ <br>\\ Au fond de la tente, non loin du Sultan, deux grands esclaves russes, [[ampnjyouri|Youri]] et [[ampnjigor|Igor]] veillaient au grain. C'étaient deux colosses qu'il valait mieux ne pas déranger. Enfin, en ce qui concerne le covenant, [[ampjaiello|Aïello]] et [[ampjantoine|Antoine]] m'accompagnaient, ainsi qu' [[ampjabdel_kader|Abdel Kader]] qui occupait la position stratégique d'intendant (bien qu'il ait, pour son 1er test, commis quelques belles bourdes), Zamma, [[ampjiguinaga|Iguinaga]] et 3 autres basques chargés de gérer le gibier. J'avais pris soin de masquer la marque Sahir autour de mes yeux, afin de ne pas susciter de nouveaux problèmes. D'autres hommes étaient présents, à savoir les pages des seigneurs qui s'activaient autour et hors de la tente, ainsi qu'une vingtaine d'hommes d'armes postés dans le camp.<br>\\ <br>\\ Le souper ne fut pas très long, limité à des échanges d'amabilités en ce qui nous concernait, à des discussions banales en berbères entre les seigneurs, à l'exception des deux conseillers du Sultan qui parlaient arabe (sans doute parce qu'ils étaient des berbères venant d'une autre région du Maghreb). Nous pûmes cependant constater un élément positif : l'imam du village semblait assez déconsidéré car, ayant croisé le Sultan avant son arrivée au covenant, il avait déversé un flot de critiques à notre égard, alors que nous venions quant à nous de louer son honneteté et son action en faveur des plus humbles. Assurément, le religieux n'aimerait pas cette manoeuvre. Bref, la tactique que j'avais préconisée était payante mais le chemin à parcourir pour placer l'imam sous notre influence s'annonçait encore long.<br>\\ <br>\\ <h2>2. Conciliabules inquiétants</h2>\\ Le dîner était terminé depuis longtemps quand la porte de notre tente s'ouvrit pour laisser passer deux mages : Aïello et Abdel venaient d'entrer. Ils semblaient assez nerveux. La prima était trop occupée à ruminer de sombres pensées pour nous expliquer la situation. Abdel se fit un plaisir de parler à sa place. Ils revenaient de chez le Sultan. Ils avaient voulu s'assurer que tout se passait bien et, surtout, lui demander confirmation de ses ordres au sujet de Hiram. C'était Shirine qui avait mis la puce à l'oreille de la prima lorsqu'elle lui avait fait part de son étonnement : Abi Nassif n'avait aucun intérêt à liquider son cousin avec qui les relations étaient bonnes. Et ces doutes venaient de trouver confirmation ce soir. <br>\\ - (Abdel) Abi Nassif n'a jamais donné l'ordre de tuer Hiram, il ne connaît d'ailleurs pas de Fafr ! Il nous a dit que c'était son oncle Suleiman qui avait reçu la charge de veiller aux préparatifs de la chasse. Quant aux auteurs potentiels de la machination, le Sultan semble exclure Bouktir, le conseiller de Jaen, et Idil, le vieux général. Il a aussi évoqué la jalousie de ses deux conseillers à l'égard de Hiram. Dans tous les cas, l'opération est annulée, mais on a un problème !\\ - (Korman, soudain très inquiet) Je vois 3 hypothèses : 1° le coup vient des Almoravides, pour déstabiliser le nouveau pouvoir et notre covenant est instrumentalisé ; 2° le coup vient des Almohades, dans le cadre d'une rivalité interne et, dans ce cas, il ne faut pas écarter l'hypothèse que certains en profitent pour nous éliminer au passage en nous impliquant dans un meurtre : pensez au vizir ou à Oumar qui ont vécu le mandat du Sultan à notre égard comme un échec cuisant ; 3°, et là je suis beaucoup plus inquiet, le coup viendrait des démons et nous viserait directement !\\ - (Aïello) Je crois davantage en cette 3ème hypothèse. [[rappelez_-vous|Rappelez-vous]] ! Fafr est arrivé en demandant à parler au vrai chef. Il savait ! Ça m'a paru tout de suite très louche. Or, les Almohades ne savent pas.\\ - (Abdel) Ça pue le démon, en effet. Mais laissons de côté les raisons. Il faut penser à l'action. Primo, il faut retrouver Fafr et proposer ce travail à Dame Ainhoa. Secundo, il faut protéger Hiram.\\ - (Korman) Bien. Aïello, toi qui disposes d'un lien arcane avec ta mater, peux-tu lui transmettre un message du style 'Débrouille-toi retrouver Fafr. Urgent' ?\\ - (Aïello) Euh...\\ - (Korman, sautant déjà à une idée suivante) Pour Hiram, il faut s'organiser. Vous avez vu les armes nouvelles qu'ils veulent tester ? Des arbalètes ! Le tueur pourrait tirer de loin ! [[peut-|Peut-]]être faut-il agir sur la cible, lancer un Muto Corpus sur Hiram pour le rendre insensible ? Antoine, qu'en penses-tu ?\\ - (Antoine) Sans qu'il s'en rende compte ? Impossible ! Un Muto Corpus transformerait ses perceptions. Et puis, il faut un sort balèze. Je pensais à un Rego Herbam, pour dévier tout projectile en bois, donc aussi les carreaux d'arbalète.\\ - (Aïello) On pourrait aussi partager le Parma ? Bon, cela ne protège pas des attaques non magiques mais si des démons sont impliqués... Mais, j'y pense, ça inclut un rituel avec le gars !\\ - (Antoine, après réflexion) Pour un sort de protection assez puissant, il faudrait un talisman... qui prendrait une saison de préparation par Molosse !!! » Et le débat sur les sorts possibles se poursuivit quelques minutes, aboutissant finalement à un pénible constat d'irréalisme. Aïello en vint à une proposition radicale :\\ - (Aïello) Rendons Hiram malade !\\ - (Abdel) Alors, on ne sait pas qui dirige l'attaque ! Si Hiram est hors circuit, n'importe qui peut être visé à sa place ! On a un avantage : on sait ! Il faut l'utiliser.\\ - (Aïello) Dans ce cas, on peut demander à Ainhoa qu'elle surveille de très haut les individus, afin de savoir qui est où. Le mieux, je crois, est de l'appeler maintenant. Je vais lui fixer rendez-vous discrètement. J'aimerais cependant savoir si on est vraiment d'accord de laisser Hiram participer à la chasse. » Le vote qui suivit fut sans surprise : le cousin du Sultan allait devoir servir d'appât.\\ - (Korman) Soit. Mais n'oublions pas : si quelqu'un veut nous nuire, il peut toujours décider de porter le coup ailleurs ! » Sur ces paroles, le groupe mit fin à la discussion, bercé par un sentiment de précarité et d'impuissance. Aïello sortit, après avoir contacté en pensée sa mater.<br>\\ <br>\\ Le ciel était clair, constellé d'étoiles qui brillaient durement dans l'air froid et piquant. Aïello se frotta les bras, s'ébroua et s'éloigna discrètement hors du camp. Quelques gardes veillaient encore, pressés autour de leurs feux, tapant parfois du pied pour ne pas s'engourdir. Dans un coin, les chevaux bruissaient. Tout était si calme. Aïello franchit les abords buissonneux, s'enfonça dans le bois jusqu'à une clairière d'où l'aigle pourrait la voir sans peine. Elle patienta un peu avant de voir Ainhoa atterrir à ses côtés. Aïello lui expliqua le revirement de situation et lui proposa de servir de surveillante. Ainhoa acquiesça : si les mages étaient là, elle pourrait encore les avertir rapidement en cas de mouvement suspect. [[elle_-m|Elle-m]]ême n'interviendrait qu'en situation extrême. Mais comment rendre tout cela acceptable aux yeux des chasseurs ? Elle proposa de jouer son aigle de chasse. Aïello trouva l'idée excellente : sa mater lui parlerait en pensée mais elle devrait lui répondre en parlant, chose tout à fait habituelle chez les dresseurs d'oiseaux de proie. Quant à Fafr, Ainhoa ne ferait rien de particulier, à moins que le faux émissaire apparaisse sur le terrain de chasse. Ravies, mater et filia topèrent main contre aile et revinrent ensemble avant de rentrer ensemble au camp.<br>\\ <br>\\ <h2>3. Départ pour la chasse</h2>\\ Bien avant l'aube, Abdel Kader se leva et, en silence, sortit de la tente pour lancer les préparatifs du petit déjeuner. Il s'y appliqua avec soin, tentant de faire oublier les bévues de la veille. Vers 5 heures, le village de tentes commença à s'agiter et peu à peu, les hommes sortirent humer l'air froid de la montagne. Les cernes et les grimaces fugitives montraient que leur sommeil avait été insuffisant. L'âge aidant, ils étaient encore un peu fourbus. Je notai que les dignitaires étaient tous habillés en civils : tuniques soigneusement drapées, turbans serrés, bottes robustes, ceinture ouvragée pour le Sultan, poignards magnifiquement et diversément sertis, ils semblaient sortir tout droit du désert. Ce fut un choc pour moi de les découvrir ainsi. Une boule avait dû me frapper au ventre et je compris que leurs habits me rappelaient directement mes origines. Moi aussi, je venais de l'autre côté de la mer. Mes tuniques actuelles semblaient soudain inappropriées, fausses, mensongères. Il me fallut lutter intérieurement : je n'atis sans doute pas de leur tribu et s'ils constituaient des hôtes aujourd'hui, la plupart n'hésiteraient pas, en découvrant ma vraie nature, à m'envoyer suffoquer sur une croix. J'eus moins de mal en voyant apparaître Suleiman, vêtu comme un riche marchand. À ses côtés, le jeune Magued ou le vieux Mime et leurs habits très stricts semblaient d'une tristesse abyssale. Un seul semblait sortir du lot : Dafr, conseiller Almoravide, avait gardé ses habits occidentalisés. Il affichait ses origines ibériques et semblait silencieusement défier le nouveau régime au service duquel il travaillait pourtant. Son accoutrement fut pour moi à la fois un signal et un rappel. Un signal qu'une résistance demeurait possible, même en acceptant le changement de pouvoir. Un rappel à ne pas oublier sa véritable place, sa véritable identité, et refuser à se faire passer pour ce qu'on n'est pas. Je songeai amèrement que ce type de comportement avait cependant des limites et que je cachais mon tatouage Sahir pour préserver ma vie mais aussi pour éviter que mes sodalès n'en patissent...<br>\\ <br>\\ Aïello apparut et après un conciliabule discret avec Abdel et un basque, elle rejoignit la table. Elle put nous communiquer discrètement qu'elle avait fait mander Wigéric qui devrait arriver alors que la chasse aurait été bien entamée.<br>\\ <br>\\ Dès ma sortie, je m'efforçai de tenir mon rôle de chef de la communauté, me multipliant en civilités. Je tentai d'approcher Hiram qui se montra en jeune homme très poli. Il ne semblait pas plus nerveux qu'un autre et semblait ignorant de la menace de mort qui pesait sur ses épaules. Assez vite, il se montra gêné de l'attention que je lui prodiguais et je m'arrêtai bien vite, soucieux de ne plus trop en faire. De manière générale, les mages se débrouillaient fort mal : pendant que je semblais poursuivre Hiram, Aïello parlait à son aigle, Antoine ne disait et ne faisait rien. Abdel, lui, se démenait comme un beau diable, tentant visiblement de compenser nos lacunes. Heureusement, les invités étant tous un peu endormis, cela passa relativement bien. À un moment, Abdel qui passait près des conseillers, surprit un bout de conversation :\\ - (Dafr, agacé) Allons, Mime, sois toi-même ! Arrête de faire semblant !\\ - (Mime, rattrappant son turban qui glissait) Non, on travaille pour un nouveau pouvoir qui a réussi. Il y a des nouvelles traditions...\\ - (Dafr) Des nouvelles traditions ? Tu parles ! Et c'est un vieux qui le dit !\\ - (Abi Nacif, élevant la voix par-dessus le tumulte) Alors, qu'est-ce qu'on chasse aujourd'hui ? » Les conversations éparses se turent, faisant place à une curiosité générale et avide. Aïello s'avança et désigna la créature sur son épaule :\\ - (Aïello) Messeigneurs, permettez-moi de vous présenter mon aigle de chasse qui nous aidera durant les jours à venir. » S'ensuivit un concert de commentaires admiratifs. Il fallait avouer qu'Ainhoa était magnifique, l'âge humain n'ayant aucune emprise sur l'âge animal de la Bjornaer. Aïello expliqua que l'oiseau était dressé pour guetter les proies et que de belles bêtes avaient été repérées. Cette annonce motiva les chasseurs. « Il y a, dans les environs, mais sur des sites différents, des troupeaux de cerfs, de sangliers et des bouquetins. Par quoi voulez-vous commencer ?\\ - (Korman, voyant l'hésitation chez le Sultan) ô Commandeur des Croyants, permettez-moi de vous faire une suggestion. Commencer avec les cerfs qui annoncent de belles prises et vous plongeront dans les délices de la chasse. Puis, demain, les sangliers, animaux rapides et dangereux qui viendront ajouter du piment. Enfin, le 3ème jour, les bouquetins constitueront la cerise sur le gâteau : difficiles à chasser dans des paysages vertigineux. Vous serez alors au plus proche de la nature sauvage. » Je vis à leurs visages ravis que cette proposition les enchantait. Plusieurs se précipitaient déjà vers leurs chevaux. Le signal était lancé.<br>\\ <br>\\ Le trajet ne fut pas très long, mais la présence de mules pour porter Aïello et Antoine avait suscité pas mal de sourires moqueurs. Nous étions une quarantaine : les dignitaires, leurs pages, les membres du covenant. Les pages tenaient également en laisse une horde de chiens, dont un magnifique lévrier blanc appartenant à Abi Nassif.<br>\\ <br>\\ Tandis que je restai près du Sultan, j'envoyai discrètement Antoine nouer langue avec Hiram. Abdel, lui, sympathisait avec Mime et Dafr. Il n'eut pas trop de peine à leur faire oublier qu'ils discutaient avec l'intendant, démontrant la profondeur de son savoir et de son éducation et n'ayant pas peur de leur révéler quelques secrets du covenant. Gagnant leur confiance, il apprit que les 2 Almoravides n'avaient sans doute pas partagé les mêmes options politiques sous l'ancien régime, mais que l'invasion les avait amenés à devoir s'entendre. Mime avait à coeur de veiller sur la réforme afin que la purification des institutions ne paralyse pas la ville mais se déroule en « gant de velours ». Dafr, lui, était un ancien militaire qui avait dirigé la garnison de Grenade. C'était lui qui avait remis les clés de la cité à Idil. Dans la quarantaine, il était plus fier que son compagnon. Abdel garda précieusement toutes ces données et, comme prévu, ne se fit pas prier pour leur donner les détails croustillants attendus :\\ - (Abdel) [[voyez_-vous|Voyez-vous]], leur dit-il, Korman est officiellement le chef, mais je peux vous dire qu'il se fait mener à la baguette par Dame Aïello. Sisi ! Pas plus tard qu'avant-hier, il avait donné un ordre à un servant. Eh bien, Dame Aïello est arrivée et l'a rabroué en public ! Ah ! Il n'en menait pas large ! (rires tonitruants du trio).\\ - (Mime) Ohoho, mais tout cela est-il vraiment très correct ?\\ - (Abdel) Oh ! Si vous saviez ! Cela ne se limite pas aux relations domestiques. Il y a entre eux deux, comment dire, un lien particulier, très... intime si vous voyez ce que je veux dire. (Aussitôt, Mime et Dafr lancèrent vers moi des regards assez étranges, mêlant moquerie, intérêt et... une forme d'horreur ? Et Abdel d'enfoncer le clou :) Si Korman a des besoins, Dame Aïello se montre toujours disponible ! » Cette remarque créa un malaise. Abdel se rattrappa aussitôt avec quelques blagues qui détendirent l'atmosphère. Il ne fallut pas longtemps pour que toute la troupe soit mise au courant de mes prétendus penchants et je dus me contenter de feindre une forme de surdité aiguë. À l'intérieur, je fulminais. S'ils savaient que j'étais aimé par la plus belle femme de la péninsule, et non par cette masse informe qui nous servait de prima ! Raaah ! Abdel, je te ferais payer cet affront !<br>\\ <br>\\ Alors que notre intendant sapait gaiement les derniers lambeaux de mon autorité, je tentai d'interroger le sultan. Je voulais en savoir un peu plus sur ses orientations. Le Sultan me félicita courtoisement pour le travail réalisé jusqu'ici. Il résuma la situation à Grenade comme positive, mais ne voulait pas trop parler politique, désireux d'oublier tout cela pour se consacrer à la chasse. J'insistai doucement et il m'expliqua qu'il avait invité les marchands pour montrer que la phase militaire était terminée et qu'il fallait entamer désormais la phase de reconstruction. Suleiman, qui chevauchait à ses côtés, avait toujours soutenu l'effort de guerre en fournissant les denrées de base à l'armée. Je compris que le vieil homme en avait largement profité ! J'orientai la question vers les chrétiens. Pour le Sultan, ce front-là se portait aussi très bien, les dernières nouvelles faisant état d'avancées positives. Depuis que les Almoravides avaient été éliminés, la Reconquista était arrêtée. Il semblait confiant et estimait que la reprise de Valence n'était plus qu'une question de mois. Je ne dis rien face à cet excès d'optimisme. En fait, si je ne percevais chez le Sultan aucune pointe de tristesse, je compris très vite que je le gênais fortement à vouloir remettre sans cesse sur le tapis toutes les questions qu'il était venu oublier. Afin de garder un peu de crédit à ses yeux, je freinai ma monture et me laissai dépasser pour rejoindre Antoine.<br>\\ <br>\\ Le mage me fit part de ses impressions : le groupe semblait assez bien mélangé, à l'exception de Mime et Dafr qui riaient à l'écart avec Abdel. Il lui semblait cependant qu'une petite distinction s'opérait entre militaires et marchands. Cette impression allait plus tard trouver confirmation.<br>\\ <br>\\ Nous arrivâmes à un petit campement qu'Abdel s'empressa d'investir. Il prépara avec brio (je devais au moins lui reconnaître cela) une collation pour désaltérer et énergiser les chasseurs. Aïello profita de la pause pour effectuer quelques démonstrations avec son aigle : elle le regardait quelques secondes et l'animal s'envolait avec majesté, déployant ses larges ailes pour gagner les cieux. Durant quelques instants, il épiait le terrain et soudain, plongeait à une vitesse ahurissante, disparaissant derrière les arbres. Quelques instants après, il réapparaissait, voletant doucement jusqu'à l'épaule de sa « maîtresse ». Les Almohades regardaient en silence, impressionnés. Ils ne s'attendaient pas à une telle merveille. Ce fut Nitran qui les tira de leur immobilisme. Le marchand Cordouan sortit des arbalètes à levier dont il vanta abondamment la vitesse et le coefficient de pénétration. Son discours plongea les jeunes dans une impatience fébrile. Ils se lançaient des défis à qui tirerait le plus de gibiers avec ces nouvelles armes. Les plus âgés semblaient moins pressés de les tester. Idil prit part au jeu : « Barbas ! Je suis sûr qu'en allant à l'arc, je ferai mieux que toi avec cette nouvelle arme ! » Nitran, ravi, fit monter les enchères. Bientôt, toutes les armes furent distribuées. Je dus me contenter de mon arc à flèches, gardant néanmoins sur moi mon cimeterre. Mieux valait être prêt à tout.\\ <br>\\ <br>\\ <h2>4. Où l'on tire les cerfs</h2>\\ Idil avait proposé de faire deux groupes. J'ajoutai l'idée de mêler les archers et les arbalétriers, afin de mieux servir la comparaison. Idil accepta la suggestion et se mit à ordonner à chacun dans quel groupe se mettre. Visiblement, certains n'aimaient que très modérément de recevoir des ordres. Le 1er groupe rassemblait :\\ - Antoine,\\ - Korman,\\ - Hiram,\\ - Idil,\\ - Taïn,\\ - Bouktir,\\ - Rassan,\\ - Barbas,\\ - Dafr,\\ - et Marik. Assurément, le groupe le plus important en nombre. <br><br><br>\\ Moins nombreux, mais plus prestigieux, le 2e groupe comptait :\\ - le Sultan,\\ - Suleiman,\\ - Magued,\\ - Nitran,\\ - Mim,\\ - et Aïello.\\ \\ Dans nos groupes respectifs, nous n'étions pas les moins discrets : les plus âgés avaient du mal à se montrer silencieux. Surtout Mime qui soupirait beaucoup. Nous nous mîmes en marche et gravîmes la montagne. Nous avions de plus en plus chaud, bien plus à cause de l'effort qu'à cause du réchauffement progressif de l'air sous les rayons du soleil. Nous atteignîmes enfin un col caillouteux. Devant nous apparut une grande vallée fort encaissée, principalement recouverte d'une forêt aux feuillages orangés. En lisière, une vingtaine de biches et de cerfs broutaient tranquillement, surveillées par un cerf à la ramure impressionnante. Abi Nassif ne put s'empêcher : « Quelle chance extraordinaire de tomber sur un tel animal ! Korman, vraiment, votre organisation est excellente ! » Je l'en remerciai et m'éloignai. Zamma vint me demander les ordres. Je l'autorisai à rabattre les bêtes, mais lui demandai à ce que la chasse ne soit pas trop facile.<br>\\ <br>\\ Les hommes se dispersèrent. Nitran descendit un peu. Aïello envoya Ainhoa rabattre les plus belles bêtes vers les hôtes les plus importants. Ces derniers se dirigèrent vers l'amont, le long de la montagne, tandis que d'autres, comme Idil et Barbas, descendaient vers le troupeau. On entendit soudain des cris venir de la montagne. Les rabatteurs entraient en action. Le troupeau se mit en branle et un grondement résonna dans la montagne. La chasse était lancée.<br>\\ <br>\\ Les pages lâchèrent les chiens qui bondirent vers les bêtes en aboyant à tue-tête. Le groupe que je suivais courut vers le troupeau. Les biches filaient en bondissant avec grâce. Le grand cerf s'arrêtait par moments pour voir si les autres le suivaient. Les plus jeunes des chasseurs se mirent à tirer. Les carreaux sifflaient, provoquant la panique. Les bêtes se dirigèrent vers la pente. Plusieurs tombèrent, tuées net ou seulement blessées et rapidement achevées. Chaque mort était célébrée par un cri de victoire. Au parfum doux et humide de la forêt se mêlait désormais l'odeur cuivrée du sang versé. Les pages se précipitèrent pour ramasser les quelques trophées, tandis que leurs maîtres continuaient sur leur lancée. Le troupeau se dirigeait vers le haut de la vallée, là où précisément le Sultan et son groupe attendait.<br>\\ <br>\\ Là-haut, Nitran maniait l'arbalète avec une dextérité impressionnante, alors que Magued semblait mal à l'aise. Aïello était la seule à chasser à l'arc. Elle fut pourtant la seule à toucher une biche. [[celle_-ci|Celle-ci]] ne fut que blessée et parvint à s'enfuir. Aïello chargea une seconde flèche et tira, manquant sa cible. Alors s'éleva la voix de Nitran : « Il faut rester calme et bien viser ». Joignant le geste à la parole, il visa le grand cerf et tira après tous les autres. Aïello poussa un cri d'exclamation : Nitran venait de toucher le grand cerf à la gorge ! L'animal réservé au Sultan ! Heureusement, le carreau traversa le cou et la bête reprit sa course. Nitran sourit, satisfait.<br>\\ <br>\\ Je restais près de Hiram, surveillant les gestes de chacun autour de nous. Je tirais de temps en temps une flèche, pour faire bonne figure, sans plus. Idil ne cessait de narguer Barbas : il venait d'abattre une biche tandis que le vieux général restait bredouille. Les hommes se montraient assez sportifs. Seul Nitran semblait regretter que la chasse devienne une course et non un stand de tir. Ayant du mal à suivre le groupe du Sultan, notre groupe le rejoignit assez vite. Nous perdîmes le premier groupe de vue. Ce n'était pas par hasard : Aïello venait de lui faire prendre un raccourci pour atteindre la hauteur où la forêt s'arrêtait. Un peu plus haut, il y avait un pic. En contrebas résonnaient les jappements des chiens qui semblaient approcher. Aïello exposa ses hypothèses : soit le cerf allait redescendre dans la vallée, soit il allait contourner le pic. Elle proposa à son groupe de couper le chemin du troupeau et conseilla, humblement, au Sultan de reprendre l'arbalète. Abi Nassif accepta avec joie : il allait pouvoir souffler un peu.<br>\\ <br>\\ N'ayant aucune idée de ce que la Prima tramait, notre groupe grimpait hardiment la pente. Nous entendions les chiens en avant. Nous arrivâmes rapidement au-delà de la lisière de la forêt. Devant nous, la pente raide de cailloux. Nous la gravîmes et contournâmes le pic pour filer droit devant. Hiram, Idil et compagnie avaient visiblement envie d'en découdre. Les plus âgés avaient abandonné et préféraient rentrer au camp.<br>\\ <br>\\ Derrière le pic rocheux, Abi Nassif et ses compères nous regardèrent passer patiemment. Aïello pesta intérieurement en entendant une voix les héler doucement. Nitran venait de les rejoindre. La Prima hésita un instant à lui faire un croche-pied. Elle eut une idée plus sournoise : « Maître Nitran, je voudrais pouvoir tester l'arbalète ». Mais Nitran pouvait être tout aussi retors : il fit semblant de n'avoir pas entendu. Aïello tenta un sort pour le faire trébucher. Elle rata. Un grondement sourd se fit entendre. Le troupeau approchait. Chacun se mit en place. Nitran, lui, était déjà prêt avec son carreau. Soudain, une vague brun doré surgit. Biches et cerfs galopaient, apeurés par la mort qui les traquait. Mais la mort les attendait. Et elle fondit sur eux en sifflant. Le grand cerf vit le danger trop tard. Un carreau d'arbalète lui perça le flanc. Nitran exulta. Aïello tenta de le prendre de vitesse. Sa flèche toucha la bête mais déjà, le Cordouan avait rechargé et levait son arbalète. Aïello, outrée, tenta de le faire tomber par un sort silencieux. Elle serra les poings en constatant un nouvel échec. Nitran tira. Le cerf, touché de plein fouet, s'effondra. Les bêtes autour de lui étaient paniquées. Plusieurs poursuivaient leur course. Le Sultan et ses compagnons canardèrent le chef du troupeau, achevant le travail du marchand d'armes qui, satisfait, les regarda en lançant : « Et voilà ! » Abi Nassif lui concéda cet exploit de mauvaise grâce. Aïello se retint de laisser libre cours à sa rage. Visiblement, le Sultan voulait se montrer beau joueur mais Nitran se fichait du cerf comme d'une guigne. Il avait simplement voulu démontrer la supériorité technologique de sa nouvelle arme. Malheureusement pour lui, les autres chasseurs étaient mécontents : aucun n'avait réussi à tuer une cible. Certains avaient pu blesser un animal mais plus par chance que par maîtrise de l'arme. Nitran avait-il vraiment réussi son coup ?<br>\\ <br>\\ Nous nous retrouvâmes au pied du pic et prîmes le chemin du retour. Une délicieuse odeur nous accueillit : Abdel avait mis les petits plats dans les grands, nous présentant une collation copieuse. Aux abords du camp, des tiges en bois étaient apprêtées pour porter le gibier abattu. Ma colère contre Abdel retomba aussitôt : son travail était éblouissant et servait grandement la cause du covenant. Je pus le constater dans le regard des pages du Sultan ou de Rassan, le gouverneur de Motril : plus habitués aux parties de chasse, ils voyaient l'effort fourni. Les autres pages l'appréciaient aussi, mais plus modérément, peu conscients de ce que ce résultat nécessitait. Je profitai des félicitations qui pleuvaient sur moi, chacun vantant l'organisation de cet événement. Nitran, lui, restait en retrait. Visiblement, il avait compris.\\ <br>\\ <br>\\ Ce n'est qu'au moment de repartir que nous constatâmes l'absence d'un dignitaire : Taïn, le marchand de Motril, était manquant. Aïello partit avec Zamma et l'aigle pour le retrouver. Les plus jeunes semblaient nerveux, les plus âgés gardaient leur calme. C'est à ce moment-là que Wigéric arriva.\\ <br>\\ <br>\\ <h2>5. Passages sur le grill</h2>\\ La présence de Wigéric avait été voulue par Aïello pour détecter les auras maléfiques. Mais comment lui permettre de regarder les invités dans les yeux, comme la détection le recquérait, sans éveiller les soupçons ? Je proposai à Abdel de faire le tour des Almohades en leur demandant s'ils avaient des demandes spécifiques pour le repas du soir. Wigéric serait présenté comme scribe. Abdel se mit à pester ouvertement contre ce qu'il considérait comme une erreur d'étiquette qui mettrait à mal son honneur. Le ton monta très vite entre nous et ne passa pas inaperçue. Une nouvelle fois, ma colère resurgit. Il fallait que je remette Abdel à sa place !<br>\\ <br>\\ Abdel finit par se soumettre et fit le tour des hôtes pour voir si tout allait bien. Wigéric le suivit et joua le scribe. Mais ses yeux sondaient l'aura de chacun. À la fin du tour, il revint vers Antoine et moi et fit discrètement son rapport :\\ - Bouktir Al Rachid, le conseiller du gouverneur de Jaen, n'était pas un humanoïde normal. Il était peut-être limite. Mon sang ne fit qu'un tour en entendant cela. Mais je n'étais pas au bout de mes surprises. Wigéric estimait que Bouktir avait une foi très forte, que « la lumière était en lui ». Mais était-il musulman ? Comment Wigéric pouvait-il détecter cette aura bénéfique si Bouktir n'était pas chrétien ? C'était un mystère.\\ - Idil avait plein de sang sur les mains. Je songeai qu'en tant que chef des armées, cela s'expliquait aisément.\\ - Rassan, le gouverneur de Motril... Wigéric hésita : il n'était pas très net. Lorsqu'il l'avait songé, il avait pensé que Motril était une ville de démons. Bref, il était mal à l'aise.\\ - Les autres semblaient on ne pouvait plus normaux. Wigéric avait au passage sondé les pages de Rassan, Saltan et Abdul, de même que celui d'Abi Nassif, le dénommé Nodil. Tous trois étaient normaux.<br>\\ <br>\\ Alors que je réfléchissais à ces données en me tenant un peu à l'écart, j'eus la désagréable surprise de voir Bouktir s'approcher. L'homme avait un regard à la fois sombre et perçant. Je me sentis fouillé et un immense malaise m'envahit.\\ - (Bouktir) Merci pour cette belle chasse, maître Korman. Merci à vous qui dirigez cette communauté.\\ - (Korman, hésitant) Merci à vous Maître Bouktir. Vous nous honorez de votre présence et de votre magnanimité. Nous essayons, avec nos moyens très simples, de nous montrer à la hauteur de vos attentes.\\ - (Bouktir, le regard luisant) Êtes-vous ici depuis longtemps, vous et votre communauté ?\\ - (Korman, ayant senti le vent tourner plus vite que prévu) Hmmm, depuis quelques années.\\ - (Bouktir) Et vous avez reçu la garde du col ?\\ - (Korman) Ouioui. Le Sultan Abi Nassif nous a fait l'honneur de sa confiance.\\ - (Bouktir) Certes, mais il y a beaucoup de passage ?\\ - (Korman) Sur le col ? Euh... Cela circule bien oui. En belle saison du moins. L'hiver, le col est souvent fermé.\\ - (Bouktir) Donc, beaucoup de marchands passent. Cela doit faire vos affaires, non ?\\ - (Korman) Que voulez-vous dire ?\\ - (Bouktir) Vous leur faites payer le passage, non ?\\ - (Korman) Oui, ainsi que le Sultan l'a demandé.\\ - (Bouktir) Et vous gardez tout, non ?\\ - (Korman, très embarrassé par cet interrogatoire) Non, le Sultan réclame la part qui lui est due et nous nous en acquittons avec plaisir.\\ - (Bouktir) Quel pourcentage demande-t-il ?\\ - (Korman) Ce n'est pas un pourcentage. Mais un forfait annuel.\\ - (Bouktir, surpris) Un forfait ? Mais c'est donc tout à votre avantage ! Plus il y a du monde, mieux c'est, non, Maître Korman ?\\ - (Korman, très mal à l'aise) Nous pouvons garder le solde, oui, mais nous ne recherchons pas la richesse. Comme vous avez pu le voir, nos moyens restent simples. » <br>\\ Bouktir avait fait mine d'écouter mais il se lança dans un discours sur la vraie foi, estimant que l'on pouvait être purifié par le glaive en frappant l'ennemi. Et il insista : l'ennemi était intérieur. Puis, rapidement, il rappela que le Coran faisait la distinction entre ceux qui dirigent et ceux qui rendent la Justice. Il conclut : « Vous devriez confier la Justice à l'imam, maître Korman ! » Je le remerciai de ce conseil plein de sagesse et mis fin à la conversation. J'étais très inquiet : Bouktir avait-il senti la nature particulière de la communauté ? [[avait_-il|Avait-il]] senti que nous formions un covenant magique ? Je n'eus pas le temps d'approfondir cette question : Aïello revenait avec Taïn. Le marchand s'était perdu mais il portait fièrement sa biche qu'il avait poursuivie au coeur de la forêt jusqu'à pouvoir la tuer. Il semblait ravi de son exploit. Soulagés de l'avoir retrouvé, nous reprîmes le chemin du retour.\\ <br>\\ <br>\\ <h2>6. Complot à carreaux tirés</h2>\\ Sitôt revenu au le camp principal, Abdel s'était remis au travail. Il cherchait le juste équilibre entre rusticité et confort, rusticité pour faire partir les invités dès que possible, confort pour qu'ils s'en aillent avec un bon souvenir de notre accueil. C'était un mélange délicat et il semblait que notre intendant ait trouvé la bonne mesure. Pendant ce temps, j'allai trouver Nitran. En quelques mots, je lui fis comprendre qu'il serait très malvenu que des hommes n'ayant pas pu expérimenter comme lui l'arbalète aient un accident durant la chasse aux sangliers. Ces animaux étaient rapides et un jeune prince pourrait mal viser et se retrouver pour cible d'un animal en colère. Un tel accident non seulement ternirait la chasse et nous causerait des soucis, mais provoquerait également la fin de l'entreprise commerciale de Nitran... Le marchand tenta de nier l'évidence : non, l'arbalète ne nécessitait aucun entraînement ; oui, il se maniait avec aisance et efficacité. Je mis les choses au point : je pensais que cette arme était une chance pour l'armée almohade. Nitran acquiesça : les carreaux perçaient les armures et les chrétiens étaient interdits d'usage de cette arme. Je réitérai mon soutien à son entreprise et lui fis comprendre que, dans la mesure de mes possibilités, je l'aiderais. Mais il devait éviter de prendre des risques inconsidérés. Il m'expliqua alors n'avoir pu, jusqu'ici, organiser une grande démonstration. Je lui proposai de tenter d'en lancer une, de manière absolument « spontanée », afin d'éviter que les Almohades nous en tiennent rigueur, à lui comme à moi. J'avançai même l'idée de m'entraîner durant la nuit afin de bluffer un peu les spectateurs. Nitran accepta avec joie. Il sembla moins heureux lorsque je suggérai que ce genre de service méritait une rétribution. Nous négociâmes et aboutîmes à un accord : Nitran cherchant à vendre aux garnisons de Motril et de Grenade, si, grâce à notre aide, il obtenait le contrat de vente à une garnison, il nous offrait une arbalète et de l'or. En cas de contrat avec les deux garnisons, il nous offrait deux arbalètes et davantage d'or. Je le quittai satisfait.<br>\\ <br>\\ Ayant rassemblé les mages sous la tente, je leur exposai l'offre de Nitran. La réaction d'Aïello fut immédiate : « Pas question de risquer notre peau pour si peu ! » Je leur réexpliquai patiemment mes arguments :\\ -# il était inutile de faire courir des risques supplémentaires aux Almohades. Ce que j'avais dit à Nitran était fondé : en organisant une démonstration improvisée, je voulais donner l'occasion à chacun de s'entraîner avant d'affronter les sangliers. En réduisant le risque d'accident, nous nous mettions à couvert.\\ -# C'était là une occasion à saisir : au-delà du très petit bénéfice que nous toucherions, nous aiderions les Almohades à reprendre peu à peu le dessus sur la Reconquista. Nous avions assez de dangers de ce côté-là pour ne pas soutenir les possibilités qui s'offraient à nous. Si notre situation à nous, les mages romans, était fortement compromise, il fallait soutenir les mondains arabes face aux mondains chrétiens que les mages Reconquête ne se gênaient pas d'aider, eux ! J'avais l'impression, en écoutant Aïello exposer ses craintes, que le but premier du covenant passait au second plan. Sauver le savoir arabe impliquait pour nous de stabiliser le front mondain. Et si l'achat d'arbalètes pouvait y aider, même modestement, il fallait le soutenir !\\ -# Il était évidemment hors de question d'agir ouvertement ! Nitran s'était suffisamment mal vu comme ça ! Je leur expliquai le plan que j'avais imaginé et qui était d'une très grande simplicité. Nous devrions, le lendemain matin, profiter du trajet vers le camp au pied de la forêt des sangliers pour obliger le groupe à s'arrêter un certain temps. Il suffirait de provoquer l'égarement d'un des Almohades, quelqu'un d'assez haut placé pour éviter que les autres ne décident de continuer leur chemin (une idée inspirée par la mésaventure de Taïn). Durant l'attente, je demanderais à Nitran de me montrer le fonctionnement de l'arbalète, de manière tout à fait naturelle. Et je comptais sur la gouaille du marchand pour éveiller l'intérêt des autres. Deux heures d'arrêt suffiraient pour que les chasseurs acquièrent les bases du maniement de l'arme. Restait à trouver le moyen d'égarer le quelqu'un en question. S'ensuivit un long débat avec Antoine sur les moyens d'y parvenir. Chaque idée semblait trop délicate. Pourtant, une idée émergea, d'une simplicité étonnante : Antoine pouvait suggérer à un dignitaire le besoin pressant d'aller se soulager. Ainhoa se chargerait alors de lancer, depuis les airs, un sort d'égarement à l'image de ceux qu'elle avait utilisés pour masquer la mine de cuivre. Nous attendriions le temps nécessaire avant de le « retrouver » et de le ramener. </br>\\ <br>\\ \\ Encore une fois, Aïello s'opposa à cette idée. Trop de risques, estimait-elle. Abdel l'approuvait voire même se montrait plus véhément qu'elle. Je l'ignorai. Ainhoa s'abstenait. Restait Antoine. Si Antoine me soutenait, je gagnais la partie. Je lui rappelai qu'il avait une dette à mon égard et que je lui proposais de l'effacer purement et simplement. Antoine réfléchit. Aïello se moqua de lui : comment pouvait-il mettre en balance des intérêts aussi mesquins et bassement matériels avec la survie du covenant ? Mais le défi que je lui avais lancé sur la réalisation d'un sort simple à lancer sur un dignitaire, l'idée que j'avais glissée qu'en cas d'échec, eh bien rien ne se produirait, tout cela finit par le convaincre. Il vota en faveur de mon plan et j'exultai. Désormais, malgré leur mauvaise foi, les autres mages devaient se conformer au plan et le soutenir. Quant à Abdel, il n'avait qu'à retourner à ses casseroles !<br>\\ <br>\\ Le soir même, la fête battait son plein. Abdel avait préparé la viande des biches et des cerfs, réalisant un véritable banquet qui concluait la journée avec panache. Les conseils de Shirine et, je devais le reconnaître, la réalisation de l'intendant avaient contribué à un beau succès. Les chasseurs étaient ravis. Je profitai du brouhaha pour exposer notre plan à Nitran (sans les détails magiques, bien sûr !). Il se déclara prêt à le suivre. Aïello, elle, avait retrouvé Hiram que nous avions laissé seul durant notre dispute. Abdel, lui, veillait au bien-être de chacun. Il eut la surprise de voir Bouktir l'approcher et l'emmener à l'écart.\\ - (Bouktir) Vous êtes un intendant très compétent, cher Abdel. Vos maîtres ont de la chance !\\ - (Abdel) Euh... merci...\\ - (Bouktir) Non, vraiment, ces gens sont exceptionnels. Ils vous gardent et en plus, ont réussi à conserver leur seigneurie malgré les changements. Oui, vraiment, Abi Nassif est clairvoyant.\\ - (Abdel) Loué soit Allah de lui accorder sa lumière.\\ - (Bouktir) Comment avec des moyens aussi modestes parvenez-vous, pour notre chasse, à un tel succès ?\\ - (Abdel) Il faut parfois se sacrifier, mais aucun sacrifice n'est vain pour le Sultan.\\ - (Bouktir) J'ai cru comprendre que vos revenus avaient augmenté, non ?\\ - (Abdel, sentant venir le vent) Avec les bénéfices, notre maître à demandé à faire construire une mosquée.\\ - (Bouktir, surpris) Mais c'est là une excellente nouvelle ! À Jaen, le commerce avec Motril prend de l'ampleur. Il n'y a qu'une seule autre route entre les deux cités, à part la vôtre. Mais elle est beaucoup plus longue car elle passe par Grenade... Si l'autre route est attaquée, il faudrait passer par ici...\\ - (Abdel, direct) Et si les taxes du col diminuaient pour les marchandises liées à Jaen ?\\ - (Bouktir, excité par l'esprit d'Abdel) Ce serait une excellente nouvelle en effet ! » Commença alors une longue négociation entre les deux hommes. Chacun rivalisait de ruse et d'ingéniosité. Le temps passa et ils n'aboutirent à aucun accord. Ils se quittèrent en se serrant la main, se fixant rendez-vous au lendemain pour poursuivre la discussion. Chacun s'en alla avec le sentiment d'avoir, pour une fois, trouvé un adversaire à sa mesure. Et cette seule pensée les comblait.\\ <br>\\ <br>\\ Les feux avaient diminué. Le vallon était paisible, plongé dans la douce et froide tranquillité de la nuit. Abdel rangeait les derniers effets abandonnés par les hommes partis se coucher. En passant près d'une tente, il surprit une conversation animée. Il tendit l'oreille et reconnut Barbas et Idil. Les deux militaires semblaient fort remontés. Surtout Barbas. Bien qu'ils parlaient berbère, Abdel crut comprendre que la conversation visait surtout Suleiman, dont le nom était prononcé très régulièrement. Visiblement, le vieux militaire pestait contre les marchands qui gagnaient de l'influence à Grenade et Motril. Idil semblait d'accord mais essayait de calmer son ami. Au bout d'un moment, ils se turent. Abdel s'éclipsa en silence. Bien à l'écart, moi, je continuais mon entraînement à l'arbalète.<br>\\ <br>\\ Au petit matin, les hommes se retrouvèrent pour la prière de l'aube, avant de passer à table. Encore une fois, Abdel s'était surpassé. Les gens se sentaient très à l'aise et, au vu du programme de la journée, je sentais leur excitation qui augmentait. La chasse s'annonçait dangereuse et les hommes ressentaient un frisson. Cet énervement gagnait aussi les pages que je vis préparer des piques. Ils allaient devoir protéger leurs maîtres et se chamaillaient, chacun espérant que son maître l'emporterait sur les autres. Comme si la gloire du dignitaire rejaillirait sur ses servants. Ah ! Le vain espoir ! Aïello était absente : en fin de nuit, Siméon était arrivé, porteur d'un message urgent pour Aïello : elle devait rentrer au covenant. Je m'étais attendu à un évènement pareil : Shirine avait sûrement fugué ! La prima s'éclipsa et Ainhoa quitta le camp pour rejoindre discrètement les rabatteurs, ne pouvant plus bénéficier du prétexte construit avec sa filia. Elle surveillerait de loin notre progression pour intervenir lorsque nous procéderions à l'égarement d'un de nos hôtes. <br> <br>\\ Peu avant le petit déjeuner, il y eut une discussion assez crispée entre membres du covenant autour de la question de Shirine : Abdel la déclarait morte en sursis et je lui rétorquais que ce type de réaction était typique de ce qui avait poussé la jeune fille à commettre une bêtise. Elle avait vécu un drame pénible, à savoir sa livraison au juge par son propre père et sa condamnation à mort. Et tout ce qu'elle avait récolté, c'étaient des propos abrupts. Comment s'étonner qu'elle ait des réactions aussi épidermiques ? Siméon clôtura la discussion, de sa voix grave et posée : "Je me charge du problème." Antoine et moi pouvions nous focaliser sur la chasse.<br>\\ <br>\\ Cette fois, nous délaissâmes les chevaux et partîmes à pied. Antoine et moi brandissions une pique. Nous devisions tranquillement en nous dirigeant vers la forêt aux sangliers. Abdel remarqua que Bouktir négociait avec Taïn. L'homme agissait vite. Quant à moi, je me focalisai sur mon plan. Je m'approchai de Suleiman et lui fis la conversation. C'était un homme imposant, avec sa barbe et sa crinière blanches. Il regardait les autres de haut mais faisait l'effort de répondre courtoisement à leurs demandes. Bref, un commerçant qui avait déjà trop réussi. Il sembla ravi de parler politique, de donner son avis sur chacun. Il commença évidemment par me flatter. Je savais que ce genre de compliments n'était que superficiel. Il glissa doucement vers des sujets qui me firent dresser l'oreille. Ainsi, Suleiman se disait ravi de voir Bouktir. Évidemment, Abi Nassif allait vouloir se rapprocher des autorités de cette cité. Bonne nouvelle pour Bouktir, un homme décidément chanceux : ancien Almoravide, il était trop jeune pour avoir été corrompu. Il avait préservé sa pureté et était donc très légitimement à sa place de conseiller du gouverneur de Jaen. Je me gardai bien de réagir à ces propos, sachant pertinemment qu'il suffisait de les remplacer par leur contraire pour savoir ce que Suleiman pensait vraiment de l'individu. Et le riche commerçant de poursuivre son déversage de fiel. Non, les autres commerçants ne posaient pas vraiment de problème de concurrence. Suleiman vendait quand même mais c'était le client qui y perdait, car il passait par un intermédiaire et payait un prix plus élevé au lieu de venir le voir directement, lui, Suleiman, toujours prêt à aider son prochain...<br>\\ <br> La conversation n'alla pas que dans un sens. Suleiman semblait en effet avide de savoir pourquoi Abi Nassif, son neveu, nous avait confié la garde du col. Je me lançai dans une réponse qui n'en était pas une. Suleiman, ayant bien compris, mit fin courtoisement mais rapidement à une conversation qui ne lui rapportait plus rien. Je le quittai et en me retournant, je vis Antoine me faire un grand sourire. La cible que nous avions choisi la veille avait visiblement subi son sort. Je vis ainsi Suleiman s'excuser avant de s'éloigner vers le bord de la clairière. J'étais aux anges ! Suleiman constituait la cible parfaite et je me réjouissais d'avance du tour que nous lui jouions. Il apprendrait ainsi l'humilité !<br>\\ <br>\\ Au camp provisoire, un page vint me trouver, embarrassé. Son maître, le riche et puissant Suleiman, n'était pas réapparu. Il fallait le retrouver. Je n'hésitai pas un instant et envoyai Zamma et Iguinaga avec le page. Satisfait, je me tournais vers l'assemblée qui se tournait les pouces. J'attendis un peu, puis, sentant le groupe assez mûr, je me lançai dans la comédie :\\ - (Korman) [[dites_-moi|Dites-moi]], Nitran, votre arbalète est-elle aussi fiable contre un sanglier que contre un grand cerf ?\\ - (Nitran) Euh... mais très certainement !\\ - (Korman) Je n'ai pas eu l'occasion de tester votre arme, mais en attendant que la chasse puisse démarrer, voulez-vous me montrer ? » Il ne fallut pas longtemps pour que presque tout le monde se retrouve avec une arbalète dans les mains, en train de rivaliser dans un tournoi improvisé. Seuls Barbas et Idil n'y prenaient aucune part. Ils n'étaient pas du tout convaincus. Intérieurement, je pestai car s'il fallait amadouer certaines personnes, c'était bien ces deux-là !<br>\\ <br>\\ Abi Nassif regardait les jeunes s'entraîner. Il semblait très nerveux depuis la disparition de Suleiman. Abdel s'approcha de lui pour le rassurer. Au début, le Sultan eut cette réaction caractéristique de gêne à devoir parler avec un simple intendant. Mais la gouaille d'Abdel Kader, et ses réussites passées vinrent à bout de cet a-priori. Abdel lui demanda pourquoi ces armes nouvelles, visiblement très puissantes, semblaient si peu le convaincre. Le Sultan le regarda un instant et se pencha :\\ - (Abi Nassif) Ces armes sont très efficaces, je ne le nie absolument pas. Le problème est... ailleurs. Nitran veut vendre des choses qu'il n'a pas. [[voyez_-vous|Voyez-vous]], il doit les acheter à des chrétiens du Nord qui les fabriquent. C'est là que le bas blesse : en achetant ces armes, nous renflouons les caisses chrétiennes !\\ - (Abdel, étonné) Mais... cela n'est-il pas justement péché ? Un acte impie ?\\ - (Abi Nassif) Ce n'est pas clair. J'ai confié la question à des érudits et l'affaire doit encore être tranchée.\\ - (Abdel, après un instant de réflexion) Et Nitran ne peut-il produire cette arme lui-même, vu qu'il a des exemplaires. Il pourrait les copier !\\ - (Abi Nassif) Oh ! Il a créé un atelier mais la production est beaucoup trop lente. » Conscient d'en avoir dit beaucoup, le Sultan dévia la conversation, visiblement gêné.<br>\\ <br>\\ Le temps imparti au départ s'était écoulé et, comme prévu, Suleiman réapparut aux côtés des basques du page. Le Sultan parut extrêmement soulagé. Nous tous aussi. La chasse allait pouvoir commencer. Mais le commerçant semblait un peu déboussolé, comme dans un léger état second. Qui plus est, il était très gêné de cette honteuse situation : se perdre en allant se soulager. Les autres se gardaient de sourire devant lui mais beaucou semblaient soudain fort joyeux. J'aurais été des leurs si je n'avais en tête l'angoisse face à la menace qui planait sur nous : plus que deux jours. Et durant ces deux jours, tout pouvait encore arriver !\\ \\ > { [[amresume_20071012|Automne 1165 - suite]]}
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